Marché des céréales
Les printemps se suivent mais ne se ressemblent pas
La campagne 2022-2023 va s’achever avec des marchés suffisamment approvisionnés pour passer sereinement la période de transition. Le corridor de la Mer Noire reconduit soulage les opérateurs qui n’ont plus comme seule horizon, la prochaine récolte 2023 dans l’hémisphère nord.
Depuis quelques jours, les prix des principales céréales se sont alignés sur les marchés français autour de 260 € la tonne. Ils sont inférieurs de près de 90 € à 100 € à leurs niveaux de l’an passé à la même époque alors que la guerre en Ukraine faisait rage et le trafic maritime sur la Mer Noire était bloqué.
Ce printemps-ci, la Russie et l’Ukraine sont très présentes sur les marchés des céréales. Les années passées, avant le conflit, les pays se précipitaient à écouler leurs récoltes dès la moisson achevée.
La Russie se mobilise pour vendre le maximum de blé afin de désengorger son marché intérieur. Jusqu’à 4 Mt de blé seront exportées ce mois de mars.
Les prix sorti ferme proposés à ses céréaliers ne cessent de décevoir. Ils sont bien plus faibles que l’an passé.
Ces prix ne permettent pas de financer les mises en cultures de la prochaine campagne. Selon le sitevecon.ru, les agriculteurs russes et les exportateurs souffrent des sanctions économiques imposées par la communauté internationale à leur pays et ils sont confrontés à des problèmes logistiques. Le mois de février a été rude.
Une prochaine campagne sans éclats
En Ukraine, la moitié de ses expéditions se font dorénavant par voie maritime grâce au corridor maritime très contrôlé par la Russie. Mais les volumes embarqués sont bien inférieurs à ceux d’avant guerre.
Pour chacun des deux pays, la prochaine campagne 2023-2024 s’annonce sans éclats.
La Russie s’apprête à la débuter avec un stock de report record de 17 Mt, supérieur de 6 Mt de à celui du mois de juillet 2022. L’été prochain, ils vont peser sur le niveau des prix payés, sorti ferme, aux agriculteurs.
Or les prix intrants ont beaucoup augmenté, renchéris par la parité du rouble.
Le site Sevecon.ru rapporte que les agriculteurs pourraient réduire les épandages d’intrants et sacrifier une partie de leurs récoltes.
Toutefois, le potentiel de production est estimé à 83 Mt par le CIC, soit 13 Mt de moins que cette année (et 19 Mt selon Sevecon).
De son côté, l’Ukraine pourrait ne produire que 47 Mt de céréales, soit 40 Mt de moins qu’en 2021 car les agriculteurs n’ont pas les moyens logistiques et économiques de financer leurs mises en cultures. Un quart des terres est inexploitable.
A l’échelle mondiale, la production de céréales est d’ores et déjà évaluée à 2 283 MT, soit 33 Mt de plus que la campagne qui s’achève.
Tout au long de la campagne 2023-2024, le CIC prévoit un net redressement de la production mondiale de maïs (1 202 Mt), jusqu’à effacer la baisse de 70 Mt déplorée en 2022-2023. Les Etats-Unis (378 Mt estimées en 2023) produiraient à eux seuls 30 Mt supplémentaires.
Pour autant, leur prochaine récolte 2023-2024 serait inférieure de 18 Mt à celle 2021-2022. Mais il s’agit d’une première prévision.
Une percée de l’Ukraine sur le marché européen
En 2023-2024, le CIC table aussi sur des productions mondiales de blé de 787 Mt (- 14 Mt) et d’orges de 145 Mt (- 8Mt sur un an). Enfin, 65 Mt de sorgho, 25 Mt d’avoine et 12,5 Mt se seigle seront aussi récoltées. Là aussi, il s’agit d’une première prévision.
Toujours en 2023-2024, les sept pays exportateurs majeurs de grains de la planète (1) vendraient 178 Mt de blé en 2023-2024, près de 173 Mt de maïs et 29 Mt d’orges.
L’Union européenne pourrait exporter à elle-seule 35 Mt de blé et 10 Mt d’orges. Mais Ukraine serait aussi en mesure renouveler son exploit sur le marché européen malgré sa petite récolte.
Depuis le 1er juillet dernier, le pays a vendu 4,3 Mt de blé à l’Union européenne contre 315 000 t l’an passé. Cet exploit ternit le bilan à l’export des Vingt-sept et leurs 22,7 Mt expédiées vers des pays tiers.
Depuis le début de la campagne, l’Ukraine a aussi expédié vers l’Union européenne 10,6 Mt de maïs (+ 4 Mt sur un an) et 770 000 t d’orges.
(1) Argentine, Australie, UE, Etats-Unis, Russie, Ukraine, Kazakhstan, Canada