Marché des céréales
Récolte de maïs et taux de changes monétaires : les deux sujets sensibles des semaines à venir
Dans l’hémisphère nord, les conditions météorologiques seront déterminantes dans les plantations de maïs d’ici la fin de l’été. La défiance du dollar sur les marchés monétaires pourrait durablement modifier la compétitivité des céréales entre pays exportateurs.
Les déficits hydriques sont plus redoutés que les périodes de froid dans l’hémisphère nord, moins fréquentes que par le passé. En France, les pics de chaleur s’ajoutent à ceux des semaines passées. Faute de précipitations, les conditions de culture du maïs se détériorent. Elles é bonnes et très bonnes à 77 % au cours de semaine 30 (au 27 juillet) contre 80 % la semaine précédente. Depuis, le taux a perdu 3 points de plus, et s’affiche à 73% au 3 août.
Les opérateurs n’ont pas tardé de réagir. Le cours de la tonne de maïs gagné 5 € en une semaine sur le marché de Bordeaux où il a franchi le seuil de 160 € alors que la récolte mondiale bâtera des records : 1 164 Mt ou 903 Mt hors Chine selon le Conseil international des céréales (CIC).
Mais la hausse des cours de la semaine dernière serait aussi due au regain d’intérêt porté par les fabricants d’aliments sur la récolte 2019-2020.
Dans son dernier rapport, le CIC estimait la production de maïs dans l’Union européenne à 70 Mt. Par rapport au moins de juin, le potentiel de production a été réévalué de 1,2 Mt. En France, 15,2 Mt de grains seraient produites et 15 Mt en Roumanie. Mais dans les prochaines semaines, ses prévisions pourraient être revues en baisse sans le retour des précipitations. Elles ne prennent pas en compte la détérioration des conditions climatiques évoquées ci-dessus.
En attendant, le service de la statistique et de la prospective (SSP) du ministère de l’Agriculture est plus prudent que le CIC. Dans sa dernière note de conjoncture (cf « les productions de céréales en France » ci-dessous et la note de conjoncture Agreste), il table sur une production de 14,4 Mt (+ 10,8 % sur un an et + 1 % par rapport à la moyenne 2015-2019) avec un rendement en progression à 88,7 q/ha. Alors que ces prévisions ne prennent pas en compte l’impact des périodes caniculaires observées depuis quelques semaines.
Cela dit, « les surfaces de maïs-grain (y compris semences) progressent d’environ 117 milliers d’hectares par rapport à 2019 », précise le SSP.
Le 4 août dernier, l’association ukrainienne des exportateurs de céréales dressait un premier bilan de la moisson 2020 en Ukraine. Le pays produirait plus de 100 Mt de grains dont 38,9 Mt de maïs.
L’Ukraine serait ainsi en mesure d’exporter 33 Mt de maïs (30,5 Mt selon le CIC). Avec les Etats-Unis, les deux pays couvrent la moitié des 175 Mt de grains qui seraient vendues à des pays tiers.
Aux Etats-Unis justement, 380 Mt de maïs seraient récoltées à la fin de l’été, soit 35 Mt de plus que l’an passé. La correction surfacique apportée par l’USDA a, en quelque sorte, soulagé les opérateurs puisque moins de grains seront mis sur le marché. Et comme le maïs sera préféré aux autres céréales par les fabricants d’aliments, les stocks mondiaux de fin de campagne ne croitraient que de 8 Mt (hors Chine).
Mais les Etats-Unis (63 Mt) concentreront à eux seuls la moitié de ces stocks. Et ils pourraient être encore plus importants si la relance de la filière bioéthanol déçoit. L’an prochain, 163 Mt de grains seraient en effet destinées à la production d’éthanol. Or la situation économique aux Etats-Unis s’est bien plus dégradée que dans l’Union européenne et l’incertitude plane sur l’évolution des cours des produits pétroliers.
En ce début du mois d’août, les opérateurs des pays importateurs de céréales ont poursuivi leurs emplettes. En Egypte, le Gasc a acheté 410 000 tonnes de blé dont 295 000 tonnes d’origine russe et 115 000 t d’origine ukrainienne.
Mais la compétitivité des céréales des pays exportateurs et le fonctionnement des marchés agricoles pourraient être impactés par l’évolution des parités des grandes monnaies (euro, dollar) et de celles des pays émergents (réal brésilien, hryvnia, rouble entre autres). Toutes les conditions sont réunies pour que la hausse de l’euro par rapport au dollar (1,19 $ le 6 août) se poursuive. Un euro à 1,30 dollar ou même 1,40 dollar n’est pas exclu tant la défiance des opérateurs financiers à l’égard de l’économie américaine est forte. Alors que dans le même temps, le plan de relance de l’Union européenne a surpris les places de marchés financiers. Même les monnaies des pays émergents (réal brésilien, hryvnia) ont regagné du terrain sur le dollar !
Les productions de céréales en France
Le SSP estime la production de blé tendre à 29,7 Mt, en retrait de 24,9 % par rapport à 2019 et -15,9% par rapport à la moyenne 2015-2019. Seule 1,3 Mt de blé dur serait récoltée (- 27,1 % par rapport à la moyenne 2015-2019.
La production d’orges atteindrait 11,3 Mt (- 3,5 % par rapport à la moyenne 2015-2019. Les surfaces d’orges de printemps continueraient de progresser, représentant environ 39 % de la sole totale d’orges en 2020 (1,97 million d’hectares) contre environ 33 % en 2019.