
Marché des céréales
Déficit hydrique pour les céréales à paille
La crise économique mondiale et les conditions météorologiques à venir sont très redoutées
La production mondiale de céréales augmenterait de 54 Mt, selon le CIC.
Tirée par une production de maïs abondante (+ 50 Mt), l’offre mondiale de céréales serait déséquilibrée au regard de la conjoncture économique à venir. Aux Etats-Unis et en Europe, l’avenir des filières Ethanol et animales est sombre.
C’est la fin de la campagne. Les opérateurs ont pris connaissance des perspectives de production rendues public par l’USDA puis par le Conseil international des céréales (CIC), le 28 mai dernier.
Les cours de la tonne de blé et d’orge fourragère se sont repliés à Rouen de 2 € et 3 € la semaine passée dans le sillage de la bourse de Chicago. La réévaluation de l’euro (1,12 dollars le 4 juin) a accompagné la baisse des prix sur le marché européen alors que le climat des affaires est calme. Même si en Egypte, le GASC a acheté 120 000 tonnes de blé à 210 dollars la tonne ;
Les conditions de cultures dégradées n’ont pas alerté les opérateurs ni aux Etats-Unis, ni en Europe et en France en particulier.
Outre Atlantique, la moitié des superficies de blé sont jugés « bon à excellent », soit treize points de moins que l’an dernier !
En France, FranceAgriMer affiche des conditions de culture dans un état « bon à très bon » en blé à 56 % au 1er juin, soit le plus bas niveau depuis 2011 ». L’an passé à la même époque, l’indicateur valait 80 %.
Dans son dernier rapport, les prévisions de production de blé du CIC pour 2020-2021 sont particulièrement liées aux conditions météorologiques qui surviendront d’ici les récoltes estivales. En Ukraine, l’organisation table sur 17,56 millions de tonnes (Mt) d’exportation pour une production de 26,5 Mt. Mais le déficit hydrique accumulé les mois passés n’est pas prêt d’être comblé par le retour récent des précipitations.
De son côté, Agritel rapporte, le 3 juin dernier, dans son bulletin : « les autorités ukrainiennes anticipant une production de blé à hauteur de 23,2 Mt, elles n’envisagent pas des exportations pour la campagne 2020/21 supérieures à 14,9 Mt ». Or celles-ci s’élèveront à 20,5 Mt pour la campagne qui s’achève.
Production et consommation de blé
En Europe aussi, les conditions climatiques défavorables depuis l’emblavement des céréales d’hiver pénaliseront la prochaine campagne de commercialisation. Le CIC estime la production de blé de l'UE-27 à 131,7 Mt contre 155 Mt durant les douze mois passés sur 2019-2020.
Au niveau mondial, la récolte de blé atteindrait 766 Mt (+ 4 Mt sur un an, Inde et Chine incluses). Mais les neuf principaux pays producteurs et exportateurs de la planète ne récolteraient que 379 Mt, soit 10 Mt en moins qu’été 2019. Et pourtant, ces prévisions sont conditionnées par le retour de l’Australie (24 Mt) durant la seconde partie de la campagne 2020-2021. Dans l’hémisphère nord, seuls le Canada (34 Mt, + 1 Mt) et surtout la Russie (79 Mt, + 5 Mt) produiraient plus de blé cette année selon le CIC si aucun accident climatique ne survient d’ici les récoltes.
Orge en fort recul
Pour l’orge, la situation est quelle que peu similaire. Les prévisions du CIC sont aussi très liées aux conditions climatiques des semaines à venir, notamment en Europe et en France.
Or seules 151 Mt seraient produites dans le monde (- 5 Mt sur un an). La baisse de la production mondiale d’orges est surtout européenne (54 Mt ; - 9 Mt).
Toutefois, les stocks mondiaux de fin de campagne (29,5 Mt) augmenteraient de 1 Mt. Ces stocks supplémentaires s’ajouteraient à ceux du blé (+ 10 Mt, hors Chine et Inde) et du maïs eux aussi attendus en hausse fin juin 2021 (+11 Mt, hors chine et Inde).
En effet, la planète ne manquera pas de grains au cours des douze prochains mois. Selon le CIC, 2 230 Mt de céréales seront produites dans le monde, soit 54 Mt de plus sur un an. Mais cette forte augmentation de la production est déséquilibrée.
Sur ces 54 Mt de grains, 50 Mt seraient du maïs. Et sur ces 50 Mt, 45 Mt seraient récoltées aux Etats-Unis. Compte tenu des superficies implantées, le potentiel de production est estimé à 392 Mt (347 Mt en 2019).
Or il reste à savoir comment ces quantités de grains produites en plus seront utilisées et consommées. Sans débouchés industriels, alimentaires ou à l’export supplémentaires au cours des douze prochains mois, les stocks de report de maïs étasuniens pourraient atteindre 100 Mt, n’exclut pas Agritel. Et non pas 70 Mt, comme l’anticipe le CIC !
Jusqu’à 100 Mt de maïs en stock aux Etats-Unis
Autrement dit, l’épée de Damoclès de la prochaine campagne céréalière serait les stocks de maïs américains puisqu’ils pèseraient sur les cours planétaires de l’ensemble des céréales.
La situation économique de la planète ne permet pas d’espérer une consommation de grains plus élevée qu’escomptée par le CIC dans son rapport. La production d’éthanol pâtit de la faiblesse des cours des hydrocarbures fossiles. Le CIC table sur un rebond de la production américaine (+ 8%) qui pourrait s’avérer au fil des mois très optimiste
En Europe, l’organisme entrevoit une production européenne d’aliments estimée à 159 Mt en 2020-2021 contre 173 Mt un an auparavant. Les quantités de blé et d’orge utilisées en moins (13,5 Mt au total) durant la prochaine campagne ne seront pas compensées par le maïs dont la consommation baisserait aussi (- 0,8 Mt à 62,7 Mt) et dont les importations stagneraient.
En cause les sombres perspectives de production dans les filières animales dans les mois avenir. Pendant la période de confinement, les Européens ont fortement modifié leurs habitudes alimentaires depuis l’arrêt d’activité de la restauration hors domicile.