Chercher l’esquive
Les aléas climatiques de plus en plus erratiques imposent la recherche d’une plus grande résilience des pratiques culturales. L’étalement des dates de semis avec un bouquet de variétés est une des parades. En effet, si les cultures ne sont pas au même stade de développement en cas d’accident climatique les impacts négatifs sont limités. Cette stratégie peut aussi favoriser la gestion des attaques de bio-agresseurs.
De la résilience dès le semis
Le climat encore très particulier de la récolte 2018 montre une fois de plus la variabilité des évènements climatiques de ces dernières années. C’est par ailleurs un trait tendanciel soulevé par les climatologues dans la perspective des changements climatiques qui nous attendent. Rien n’est plus complexe en agriculture que de conduire une culture lorsque les tendances climatiques à venir se dérèglent. Si les cultures -et en particulier les céréales- sont exposées à un climat de plus en plus variable, cela doit être pris en compte dans le suivi de l’itinéraire technique. A ce stade, pas de recette universelle à proposer mais quelques principes de bon sens à avoir en tête :
- Choisir un bouquet de variétés ayant des caractéristiques différentes du point de vue du rythme de développement et de la sensibilité aux maladies. Préférer autant que possible des variétés peu sensibles aux bioagresseurs. La liste des variétés multirésistantes habilitée par le dispositif CEPP est une bonne référence.
- Etaler les dates de semis sur la période optimale de chaque région : on crée ainsi un étalement des stades de la sole céréalière et on s’expose moins à un évènement climatique exceptionnel. Il faut cependant savoir que les écarts de stades en début de cycle ont tendance à diminuer avec l’avancement en végétation mais parfois quelques jours de décalage peuvent réduire considérablement l’exposition à un gel d’épis par exemple.
- Utiliser la panoplie des OAD qui prévoient la pression des bio-agresseurs, et des maladies en particulier (baromètre des maladies du blé, TAMEO®).
En effet ces outils tactiques intègrent l’effet du climat réel de l’année mais aussi les données météo prévisionnelles dans les jours suivants. Il est ainsi possible d’anticiper de quelques jours sur les conditions à venir et de réduire l’incertitude climatique.
Le calcul prévisionnel de la dose d’azote FERTIWEB va s’enrichir pour la campagne 2019 d’une nouvelle version « Fertiweb Dynamic » prenant en compte l’impact du climat local sur la fourniture d’azote par le sol.
Interdiction des néonicotinoïdes : redoubler de vigilance vis à vis des ravageurs d’automne
Avec l’interdiction d’utiliser les insecticides de la famille des néonicotinoides dès les semis de l’automne 2018, se pose la question du contrôle des insectes d’automne porteurs de viroses. En début de cycle, si les conditions sont chaudes, on peut craindre des attaques de cicadelles qui transmettent le virus des pieds chétifs. En général, un peu plus tard dans l’automne et parfois jusqu’au milieu de l’hiver, ce sont les pucerons vecteurs de la jaunisse nanisante qui sont à craindre. Les insecticides en traitement de semence offraient une couverture satisfaisante pendant cette période mais avec leur interdiction, il faudra faire appel à d’autres leviers :
- Surveiller la présence de ces ravageur pour intervenir dès que leur population atteint le seuil critique : 10 % de plantes atteintes par au moins 1 puceron ou en dessous de ce seuil si la présence des pucerons est observée pendant au moins 10 jours.
- Dans le cadre du Contrat de Solutions les instituts techniques et de nombreux partenaires proposent des techniques permettant de réduire l’utilisation de produits phytosanitaires. 36 fiches ont été rédigées, toutes cultures confondues, pour décrire ces techniques. L’une d’entre elles recommande de retarder la date de semis de 15 à 20 jours, tout en restant dans la plage optimale de semis, afin de réduire le risque d’attaques de pucerons et cicadelles d’automne ainsi que la pression des graminées adventices. Attention cette mesure ne garantit pas une absence de risque notamment en cas d’hiver doux. Il faut donc rester vigilant dans ce cas et compléter la mesure par un traitement insecticide,si nécessaire. Il existe désormais des variétés d’orges d’hiver résistantes à la JNO (Ex : Amistar, Domino, Hexagon,…) qui peuvent constituer une autre alternative.
Jean-Paul Bordes, Directeur R&D
Site internet Arvalis : https://www.arvalisinstitutduvegetal.fr