Déclaration sur l'avenir de la PAC
DÉCLARATION PARLEMENTAIRE COMMUNE SUR L’AVENIR
DE LA PAC À L’HORIZON 2020 : « REFONDER LA POLITIQUE AGRICOLE COMMUNE, UNE PRIORITÉ STRATÉGIQUE
POUR L’AVENIR DE L’UNION EUROPÉENNE »
Les parlementaires de quatre Parlements nationaux se sont rencontrés au Sénat, le 11 avril 2017 pour un échange de vues sur l’avenir de la Politique Agricole Commune (PAC), à l’horizon 2020.
La Commission européenne a annoncé la publication, d’ici la fin de l’année 2017, d’une première communication sur le sujet. Dans ce contexte et afin de contribuer au lancement de ce débat public, les signataires de la présente déclaration ont souhaité, chacun à titre personnel, mais conjointement, exprimer leur attachement aux principes d’action suivants :
1. Rappeler la légitimité, au coeur d’un projet européen ambitieux et inclusif, d’une politique agricole commune à la fois forte, simple et lisible qui lie, dans une dimension plus ample, la question alimentaire aux questions environnementales et sociales. La PAC doit continuer à satisfaire les objectifs prévus dans les Traités, le développement du secteur agricole, ainsi que des objectifs sociaux plus larges ;
2. Affirmer que la PAC, qui demeure une priorité stratégique pour l'Union, afin de préserver sa sécurité et sa souveraineté alimentaires, doit renforcer la résilience et la durabilité de l'agriculture européenne. La PAC doit renforcer la capacité du secteur agricole à faire face à la volatilité des prix, aux aléas climatiques et aux situations de force majeure. Néanmoins, un tel renforcement ne doit pas intervenir aux dépens des soutiens destinés aux producteurs, qui, que cela soit de leur fait ou non, sont exposés à ces risques sur un horizon à court et à moyen terme ;
3. Souligner que cette priorité stratégique devra bénéficier, pour la période 2020-2026, d'un budget à la hauteur de ses ambitions, orienté selon une logique d'efficacité maximale, et ne pas constituer la « variable d’ajustement » du budget de l’Union. Doter la PAC de ressources suffisantes fait partie intégrante de la réponse, élaborée à l’échelle de l’ensemble de l’Union, aux défis des prochaines années. Ces défis recouvrent des dimensions très différentes, allant des conséquences du retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne à l’impact potentiel de la politique commerciale sur les agricultures des États membres ;
4. La réorganisation plus globale du système des ressources propres de l’Union européenne, sur la base des recommandations du groupe de haut niveau présidé par Mario Monti, devra permettre d’assurer un financement suffisant des finalités propres de la PAC ;
5. Les ressources du budget européen destinées à la PAC devront avoir pour objectif une stratégie précise fondée sur l’élévation des normes de qualité de la production, la responsabilisation de tous les sujets de la chaîne alimentaire, le renforcement du rôle des producteurs dans la filière, l’amélioration de l’information du consommateur, ainsi que la possibilité de soutenir et d’orienter des consommations de qualité ;
6. Affirmer que l’orientation de marché de la PAC rend indispensable, face aux crises qui se succèdent, de permettre aux agriculteurs de faire face à la volatilité des prix agricoles ;
7. Souhaiter que la prochaine PAC traduise l’inflexion proposée par le rapport de la « Task force » sur les marchés agricoles, publié en novembre 2016, consistant à adapter le droit de la concurrence aux spécificités agricoles et à renforcer effectivement le poids des producteurs dans la chaîne alimentaire. Traiter ces questions nécessitera de mettre en œuvre les principes de subsidiarité et de proportionnalité ;
8. Souligner que l'effort de simplification engagé par la Commission européenne doit être amplifié, pour parvenir à une PAC tournée, davantage qu’aujourd’hui, vers les besoins et les attentes des agriculteurs européens. Une PAC réformée doit répondre aux besoins des organismes publics en charge de la gestion des mécanismes actuels de la politique agricole commune, afin de s’assurer que les avantages des mesures de simplification profitent aussi bien aux bénéficiaires des régimes d’aide, qu’aux structures administratives ;
9. Insérer de plein droit dans les politiques agricoles futures les mesures de soutien et de mise en oeuvre des technologies de précision, de nature à rendre plus compétitif le secteur agricole, tout en répondant à une demande croissante d’aliments avec un moindre impact sur l’environnement ;
10. Permettre que la PAC concerne toutes les étapes de la filière agroalimentaire, de la production à la distribution ;
11. Réaffirmer l’importance de l’unité du marché intérieur, ainsi que l’importance des conditions de concurrence égales à l’intérieur de ce marché. Reconnaître également que certains États membres sont affectés de façon plus importante que d’autres par des défis spécifiques, notamment, mais pas uniquement, par la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne ;
12. Renforcer la promotion internationale de nos produits et la recherche de débouchés à l’exportation, en protégeant et en soutenant les productions d’excellence. Une PAC réformée doit encourager les producteurs à diversifier leurs productions, en particulier lorsque ce type de diversification est de nature à procurer des avantages en termes environnemental ou social, pour le soutien au développement rural.
À mi-parcours de la programmation budgétaire 2014-2020, l’examen de la politique agricole commune conduit, dès à présent, à réfléchir à son orientation stratégique à compter de 2020. Les parlementaires des Parlements nationaux de l’Union entendent participer et contribuer activement à ce débat.
M. Jean Bizet
Président de la commission des Affaires européennes du Sénat de la République française
M. Vannino Chiti
Président de la commission des Affaires européennes du Sénat de la République italienne
M. Jerzy Chróścikowski
Président de la commission de l'agriculture, du Sénat de la République de Pologne
M. Pat Deering
Député et Président de la commission de l'Agriculture de l’Assemblée d’Irlande
Une agriculture française forte
dans une Europe forte !
Par Michel Prugue, Président de COOP DE FRANCE,
et Pascal Viné, Délégué Général
Depuis 60 ans, l’agriculture française se pense et se construit à l’échelle d’un continent, l’Europe.
Depuis 60 ans, la politique agricole française est une politique européenne, la PAC. Celle-ci a permis à la France d’accroître la productivité de son agriculture, de garantir la sécurité de ses approvisionnements et d’assurer un niveau de vie plus équitable à sa population agricole.
Depuis 60 ans, notre agriculture relève donc le défi quotidien de nourrir nos concitoyens avec des produits de qualité et à des prix toujours plus bas. Au cours de cette période, les ménages européens ont ainsi divisé par deux la part de leur budget consacré à l’alimentation ! Dans le même temps, la part des dépenses agricoles dans le budget de l’Union européenne est passée de 70 % en 1970 à 37 % aujourd’hui.
Malgré le chemin parcouru, la confiance dans l’Europe est aujourd’hui ébranlée. Les raisons en sont connues : crises à répétition, suradministration, absence de perspectives,… Mais faut-il pour autant « jeter le bébé avec l’eau du bain ? ». Vouloir aujourd’hui quitter le navire agricole européen, parce que nous sommes incapables d’en influencer la trajectoire, est un terrible aveu de faiblesse. Alors que dans le même temps, les défis que nous avons à relever sont plus que jamais de dimension continentale : défi alimentaire, compétition internationale, indépendance énergétique, dérèglement climatique,…
Promouvoir la PAC
Dans ce contexte, Coop de France qui représente 2600 coopératives agricoles auxquelles adhérent trois agriculteurs sur quatre, est convaincue que c’est bien au sein de l’Europe que nous pourrons tirer parti d’une mondialisation devenue incontournable. Notre agriculture qui est la première puissance productrice de produits agricoles en Europe n’a aucune vocation à se recroqueviller sur elle-même. La question n’est donc pas de savoir s’il faut ou non une PAC, au-delà de l’échéance de sa renégociation en 2020, mais bien de définir et de promouvoir la PAC que nous souhaitons !
Pour cela, il faut d’abord réaffirmer le caractère stratégique de l’agriculture et de l’alimentation et donc la nécessité d’une politique publique ambitieuse. Toutes les grandes puissances économiques, les États-Unis, la Chine ou le Brésil, l’ont fait. Ce n’est pas un hasard. Faut-il rappeler ici qu’en soutenant ses 22 millions d’agriculteurs et de travailleurs agricoles, l’Europe en fait profiter ses 500 millions d’habitants ?
Moderniser la PAC
Il faut construire une PAC mieux adaptée aux nouveaux défis économiques. Ne soyons pas nostalgiques de temps révolus. La prochaine PAC devra assurer la pérennité des productions avec des outils de gestion des risques économiques, climatiques et sanitaires, faire évoluer le droit de la concurrence pour renforcer le pouvoir de négociation des agriculteurs, réduire les normes, soutenir la conquête de nouveaux marchés,… tout en favorisant la création de valeur sur le marché intérieur et à l’exportation (investissement, innovation). Elle devra également compenser les handicaps naturels, répondre aux attentes sociétales non marchandes et enfin assumer une certaine prise de risque par l’innovation.
Pour atteindre ces objectifs, la volonté de la France doit être forte. Nous avons besoin d’une agriculture française forte au sein d’une Europe agricole forte !
Tribune parue le 12/04/2017 sur le site internet du journal La Croix