Marché des céréales
Aucune visibilité sur les marchés mais l’effet ciseaux prix-charges de plus en plus redouté
Les cours des céréales sont très volatiles alors que les céréaliers prennent d’importants risques financiers pour financer leur campagne. Des initiatives sont lancées pour rendre le fonctionnement des marchés des céréales plus fluides et les prix des grains plus abordables.
La conjoncture de prix ne permet pas se projeter dans le temps. Les cours des céréales « sur-réagissent » à la moindre nouvelle parvenant aux oreilles des opérateurs. Jeudi 9 juin, les négociations en Turquie, entre la Russie et l’Ukraine, sur l’ouverture d’un corridor maritime sur le Mer Noire, indispensable pour approvisionner les pays importateurs de grains et fluidifier ainsi les échanges commerciaux, n’ont pas abouti. Pour l’Ukraine, il s’agit aussi de vider les silos ukrainiens de grains avant que ne soit engrangée la prochaine récolte.
En attendant, Ralph Ichter, président d’Euroconsultant a affirmé que la Russie aurait volé près de 500 000 tonnes de blé ukrainien pour les livrer à des « pays amis ». Il participait le 8 juin dernier au congrès de l’AGPB, l’Association générale des producteurs de blé liée à la FNSEA. Et par la suite, de nouveaux vols ne sont pas exclus, lorsque la prochaine récolte ukrainienne sera engrangée. Pourtant l’empire des tzars ne manquera pas de grains puisqu’il s’apprêterait à produire 83,5 Mt de blé, ce porterait le disponible exportable 2022-2023 à 39 Mt.
En attendant, les exportations européennes de grains ne sont pas affectées par la guerre en Ukraine. Selon la Commission européenne, 25,34 Mt en blé tendre et 6,78 Mt d’orges ont été expédiées depuis le début de la campagne de l’Union européenne vers des pays tiers.
Ces huit derniers jours, le prix de la tonne de blé tendre a oscillé sur le marché de Rouen autour de 380 € et celle d’orges fourragères, de 340 €. L’évolution des cours inquiète fortement les céréaliers français. Selon l’AGPB, les résultats des céréaliers de la campagne 2022-2023 dépendront des arbitrages opérés ces derniers mois sur leur exploitation (prix auxquels les intrants ont été achetés, prix de vente des céréales etc.) Mais pour 2023-2024, les coûts de production de la tonne de blé seraient, aux prix actuels des intrants, supérieurs de 100 € à ceux de la campagne qui s’achève et atteindrait 315 €. Autrement dit, un retournement des marchés durant l’été 2023 générera des pertes importantes ! Tous les céréaliers de la planète redoutent une telle situation de crise.
Au fil des semaines, les prévisions de récoltes de la prochaine campagne s’affinent et notamment celle de l’orge d’hiver en France. Le dernier bulletin Agreste du service de la prospective et de la statistique du ministère de l’Agriculture annonce une production estimée à 8,25 Mt, « en légère hausse par rapport à 2021 (+0,4 %) », précise Agreste.
Mais les conditions de cultures des céréales se dégradent semaine après semaine. En cause, le déficit hydrique qui n’a épargné aucune région ces deux derniers mois.
En semaine 21, du 24 au 30 mai, 67 % des conditions de culture du blé tendre sont bonnes ou très bonnes alors qu’elles étaient à hauteurs de 80 % en 2021 à la même époque. Mais les récentes précipitations favoriseront la pollinisation des fleurs des épis quand les champs de céréales n’ont pas été détruits par des orages de grêles. Dans l’Union européenne, la Commission européenne table sur 130,4 Mt de blé tendre.
De toutes les céréales, l’orge de printemps est celle qui souffre le plus du manque de précipitations. Seules 54 % des conditions de culture sont bonnes ou très bonnes, en repli de 7 points en une semaine et inférieure 30 points de moins à celles observées l’an passé à la même époque. Toutes orges confondues, la production des Vingt-sept serait de 52 MT environ.