Marché des céréales
La baisse des prix des intrants atténue la faiblesse des cours des céréales
L’Union européenne sera doublement pénalisée par une production de céréales d’hiver très moyenne en quantité et par des prix de vente peu rémunérateurs. En France, la baisse des prix des intrants compensera un peu le manque à gagner.
Dans son dernier rapport publié le 25 juin, le Conseil international des céréales (CIC) a réévalué ses prévisions de production du mois de mai dernier : 767 millions de tonnes (Mt) de blé (+ 1,5 Mt) et 1 172 Mt de maïs (+3Mt) seraient récoltées dans le monde durant la prochaine campagne 2020-2021. Mois après mois, ces prévisions ne font pas le bonheur des céréaliers européens.
La récolte européenne très moyenne de blé (128,7 Mt selon le CIC ; - 3 Mt par rapport à l’estimation établie en mai 2020) n’a même aucune incidence sur les cours des céréales car les marchés sont largement approvisionnés. Des premiers retours de coupes d’orges en France, il ressort des rendements hétérogènes et surtout plus faibles que l’année passée mais les teneurs en protéines seraient satisfaisantes.
La tonne de blé valait 175 € le 26 juin dernier sur le marché de Rouen (- 2 € en une semaine) et celle d’orge fourragère et de maïs respectivement 158 € (- 1 €) et 153 € (pas de changement). Sur les marchés à terme européens, le cours de la tonne de blé (177 € - échéance septembre 2020) a perdu 14 € en deux mois et celui de la tonne de maïs (153 € - échéance novembre 2020) a baissé de 15 € depuis le début de l’année. Ces tendances n’augurent aucune hausse des prix sur les marchés physiques à court terme. Aux Etats-Unis, les contrats à terme sur le maïs CBOT ont même fortement reculé, entrainés par la vente, par les fonds spéculatifs, de plus 7 000 contrats.
Intrants en baisse
Compte tenu de la baisse des rendements, les coûts de production par tonne des céréales produites en France seront probablement supérieurs à ceux de l’an passé (Arvalis publiera à la rentrée une estimation). Ils ne couvriront pas les coûts de production malgré le recul des prix des intrants.
Ces derniers sont, selon le service statistique et de la prospective du ministère de l’agriculture, inférieurs de 4,9 % à ceux de l’an passé et même de 3,7 % à leur niveau de 2015. Les prix des carburants et des lubrifiants, qui ont diminué de 22 % en un an, sont dorénavant plus faibles (- 8 %) que ceux en vigueur en 2015. Les tendances observées pour les prix des engrais et de la protection des plantes sont les mêmes (respectivement - 11 % et - 7 % par rapport à 2015).
Toutefois, la chute récente du prix du GNR (- 38,6 % par rapport à avril 2019) est trop récente pour que les céréaliers aient pu en bénéficier pleinement d’ici les prochaines récoltes.
Les autres grands pays producteurs qui comptent
Nous avons évoqué dans les précédents bulletins les conditions de cultures favorables dans le bassin de la Mer Noire et aux Etats Unis où les récoltes de blé s’annoncent très bonnes. Mais c’était sans compter les perspectives de production très favorables dans des pays moins présents sur les marchés à l’export, mais qui ne sont pas pour autant moins importants pour renforcer la sécurité alimentaire de la planète en plus d’assurer la leur.
Sans atteindre la récolte record de 2017-2018 de 21 Mt, la Turquie s’apprête à moissonner 19 Mt de blé (+0,5 Mt sur un an), selon l’USDA. Elle importera quasiment autant de blé qu’elle en réexportera sous forme de farine pour approvisionner les pays voisins dépourvus d’industrie meunière suffisante pour couvrir leurs besoins domestiques.
Estimée à 8,4 Mt, la prochaine récolte d’orges confortera la position de la Turquie dans le cercle étroit des grands pays producteurs dans le monde. Elle se situe en sixième position derrière l’Union européenne (64,1 Mt), la Russie (17,3 Mt), l’Australie (10,2 Mt) et l’Ukraine (9,4 Mt). Mais l’orge produite en Turquie est réservée pour approvisionner le marché intérieur turc.
Quasiment absentes sur les marchés à l’export, la Chine s’apprête à récolter 136 Mt selon l’USDA (+1 Mt sur un an et +2 % par rapport à la moyenne des cinq dernières années). Les rendements des 24 millions d’hectares emblavés sont estimés à 5,67 tonnes par hectare (t/ha). Mais les quantités de blé récoltées en plus accroîtront les stocks de report de fin de campagne dans le monde qui pèsent déjà sur les cours des céréales.
L’Inde, le pays le plus peuplé de la planète compte récolter 107,2 Mt, soit 3 % de plus que l’an passé, selon l’USDA. Les 30,5 millions d’hectares semés produiront en moyenne 3,5 t de blé chacun, soit 12 % de plus que la moyenne des cinq dernières années.
De bons rendements de maïs en perspective
Pour le maïs, les opérateurs ont pris connaissance de l’évolution favorable des conditions de cultures du maïs en Europe et aux Etats-Unis avec des prévisions de rendement revues en hausse. Selon le rapport MARS de la Commission Européenne, la production moyenne par hectare en Ukraine atteindrait 74 quintaux/ha (+ 2,7 % par rapport à la campagne précédente) et 82 quintaux par hectare dans l’Union européenne.
Toujours à propos du maïs, l’observatoire Céréobs de France AgriMer souligne en France que les conditions de culture « bonnes » ou « très bonnes » sont stables à 83 % au 22 juin (82% l’an dernier). Aux Etats-Unis, les prochaines précipitations annoncées dans les plaines du Middle West favoriseront la croissance des plantes. Et au Brésil, les premiers retours de récolte de la Safrinha sont très bons. Les rendements des cultures le nord du Mato Grosso sont meilleurs qu’escompté et les pertes annoncées dans le sud sont plus faible que prévu.