
Marché des céréales
Des facteurs de résistance face
à des arguments baissiers
Blé
Dans son rapport daté du 9 courant, le département d’état à l’agriculture américain (USDA) a opéré quelques révisions importantes de ses bilans. Entre autres, le stock de report mondial de blé a été revu en hausse de 5 Mt, dont 860 kt aux Etats-Unis, et s’établit à 275 millions de tonnes (Mt).
Cette révision fondamentalement baissière n’a pourtant eu qu’un effet modéré sur les cours de Chicago, les opérateurs l’ayant sans doute déjà intégrée dans la baisse qui avait précédé, après la publication du crop progress américain constatant le bon état des cultures outre-Atlantique. Il est probable, aussi, que ces chiffres de fin de campagne présentent moins d’intérêt pour les observateurs que ceux relatifs à la prochaine récolte. D’ici à la moisson, le suivi des emblavement, l’état des cultures et l’ensemble des évènements climatiques ne vont pas manquer et alimenteront le « weather market », et intéresseront plus beaucoup plus les opérateurs que les informations et réflexions sur l’ancienne campagne.
La modique baisse des cours enregistrée sur les places américaines a été suivie timidement par Euronext et encore plus par le marché physique, soutenu par l’activité portuaire élevée qui a conduit, comme nous le prévoyions, le conseil céréales de FranceAgriMer a augmenté ses prévisions d’exportation à destination des pays tiers de 200 Kt, les portant à 9,7 Mt. A la date du 8 avril, les chargements dans les ports français à destination hors U.E atteignaient 7,8 Mt, contre 5,52 l’an dernier, même date. Pour le seul mois de mars, les sorties ont porté sur 1,52 Mt ; il faut remonter à juin 2016 ou janvier 2014 pour retrouver un niveau mensuel aussi élevé.
L’Algérie reste de très loin notre premier client avec, sur cette partie de la campagne, 4,47 Mt…et le risque de déséquilibre que présente une position hégémonique. Nos ventes au Maroc ont progressé de quelque 30 %, à 922 K t, et il faut saluer le retour de l’Egypte (378 kt) parmi nos acheteurs, même si le GASC confirme sa tradition tatillonne en refusant récemment un bateau français, pour présence excessive d’ergot ; une contre-expertise est en cours. Il faut souhaiter que ce genre de tracasserie ne compromette pas le rétablissement du courant retrouvé avec l’Egypte qui lance, aujourd’hui, un nouvel appel d’offres. L’Algérie aussi revient au marché avec l’achat, jeudi, de 330 Kt de blé tendre. Les prix négociés permettraient à la France de participer à l’opération et de jauger sa compétitivité face à la concurrence argentine et américaine.
L’exportation pays tiers reste donc le facteur essentiel de résistance des prix aux arguments baissiers de certaines analyses, car le marché intérieur à destination de la meunerie ou de l’alimentation animale est atone. Euronext affichait, jeudi en clôture une petite progression (+0,75 €) de l’échéance mai, le physique maintenant une prime de + 5 €, rendu Rouen.
Le remaniement des bilans prévisionnels de FranceAgriMer intègre, grâce aux ventes extra-communautaires, un allègement du stock de report de 50 kt, à 2,39 Mt, le plus faible de ces dernières campagnes, ce qui risque, de tendre les prix à court terme.
On trouvera par ailleurs, les estimations de semis par le ministère de l’Agriculture (dans notre rubrique Statistiques et références), semis qui s’illustrent par une forte progression des surfaces de blé tendre et d’orge.
Blé dur
FranceAgriMer a révisé en hausse ses prévisions d’exportation de blé dur, portées à 900kt (+80 kt) pour les ventes à l’U.E et 220 Kt (+ 30 kt) pour celles aux pays tiers. Ce marché affiche une stabilité qui tranche avec la volatilité observée sur les autres céréales depuis le début de la campagne, en cotant entre 210/220 €, rendu Port La Nouvelle, en grade 1. Sera-ce un argument de relance de la production après la forte baisse des surfaces survenue en 2018 –9,7% selon Agreste)?
Orge
FranceAgriMer a corrigé en hausse de 35 kt t ses estimations d’exportations d’orge à l’U.E et de 50 kt les utilisations par l’industrie de la nutrition animale, portées à 1 Mt, ce qui est nettement inférieur aux chiffres des précédentes campagnes. La prévision de report d’orge a été allégée de 85 kt, à 1,69 Mt ce qui n’en fait pas moins le plus lourd de ces 5 dernières années En l’absence de nouvelles affaires conséquentes à l’export les cours se sont dégradés, la prime tombant à – 19€, rendu Rouen,. L’Arabie saoudite n’est pas revenue aux achats et la Chine s’éveille lentement. L’Iran recherche 300kt d’orge fourragère ; le récent chargement d’un bateau (50 kt) d’orge française pour cette destination peut laisser un petit espoir de participation de l’hexagone à cette affaire. Le marché intérieur ne tire pas et les cotations citées par ailleurs, sont quasi nominales.
Maïs
Les corrections des bilans USDA du maïs ont été importantes, les stocks mondiaux étant augmentés de 5,5 Mt, à 314 Mt, le stock US progressant pour sa part, de 5,1 Mt, à 51,7 Mt. Comme pour le blé, ces ajustements n’ont pas eu de répercussions baissières excessives sur les prix à Chicago. Il faut dire que le précédent rapport du 29 mars avait entraîné une chute des cours justifiant une forme de rattrapage. Les bonnes prévisions de récolte en Argentine, 47 Mt, et au Brésil, 96 Mt, pèsent néanmoins sur le marché. En Europe, l’Ukraine occupe toujours une place prépondérante ; en 9 mois de campagne ce pays a déversé sur l’union Européenne 11,5 Mt de maïs soit 5,6 Mt de plus que durant la période correspondante de la précédente campagne ; le Brésil figure pour 3,93 Mt, contre 5,18 l’an dernier et le Canada a exercé une forte percée : 1,33 Mt, versus 561 kt. Des clients traditionnels du maïs français, tels l’Espagne et le Nord communautaire, se sont portés sur ces approvisionnements pays tiers, délaissant l’hexagone aux disponibilités réduites et au prix non compétitifs. Nos exportations vers l’U.E reculeraient ainsi, selon FranceAgriMer, de 21,5 % par rapport à la campagne 2017-2018, à 3,85 Mt. En revanche, les utilisations de maïs par l’industrie de la nutrition animale réaliseraient un beau tonnage de 3,3 Mt, une progression de 33 % sur la dernière campagne. Ce qui n’empêchera pas un alourdissement du stock de report de 189 kt par rapport à aux prévisions de mars, à 2,57 Mt, pratiquement au niveau de celui de fin 2017-2018.
Trop concurrencé sur le marché d’exportation, le maïs français trouve actuellement, son exutoire auprès des fabricants d’aliments composés, sans enthousiasme mais sur des bases de prix consolidées.




