Marché des céréales
Une embellie sur les cours pour commencer la nouvelle campagne
Les prévisions de production mondiales sont excellentes. Pourtant une note de l’USDA a semé le doute parmi les opérateurs sur les places de marché : aux Etats-Unis, la surface de blé serait inférieure à celle de l’an passé tandis que celle de maïs a moins augmenté que prévu. Au Canada, la campagne céréalière s’annonce sous de bons auspices. En Russie et au Kazakhstan, le potentiel de production s’est récemment altéré, selon le bulletin JRC Mars publié par la Commission européenne.
Le prix de la tonne de blé a franchi le seuil de 180 € le 1er juillet dernier sur le marché de Rouen. La tonne d’orge fourragère se négocie 165 € ce 3 juillet, soit 7 euros de plus que la semaine précédente. Quant au maïs, le cours de la céréale (157 €/t) a crû de 4 €.
Les opérateurs n’ont pas manqué de réagir lorsque l’USDA, l’organisme américain de statistiques agricoles a publié une note de conjoncture dressant l’inventaire, état par état, des superficies des cultures implantées.
Les résultats des recensements réalisés dans chacun d’eux remettent en question les prévisions publiées ces dernières semaines par le même organisme. Les agriculteurs n’auraient cultivé que 17,3 millions d’hectares (Mha) de blé dont 12,4 Mha de blé d’hiver (et notamment 8,6 Mha Hard Red Winter) et 4,6 Mha de blé de force. En recul de 4 % sur un an, la superficie totale de blé serait ainsi la plus faible depuis 1919 selon l’USDA.
Douche froide
La note de l’USDA nous apprend aussi que les farmers américains ont planté, au printemps dernier, à la fois plus de maïs et plus de soja que l’an passé tout en mettant une partie de leurs terres en jachère. Or au mois d’avril et mai, le rapport de prix soja/prix du maïs laissait penser que la culture de maïs serait préférée à celle du soja malgré la faiblesse des cours.
IL n’en est rien. La superficie en maïs étasunienne est estimée à 37,2 Mha (+ 3 % ou + 930 000 ha sur un an) et celle de soja a augmenté de 4,8 Mha pour s’établir à 33,9 Mha.
Nous verrons dans quelques jours quelles seront les répercussions de ces prévisions surfaciques en matière de production. Le prochain rapport mensuel de l’USDA paraîtra dans quelques jours. Le 9 juin dernier, l’USDA estimait la production américaine de blé à 51 Mt de blé tendre et dur dans les semaines à venir (source USDA).
Focus canadien
Au Canada, l’institut Agriculture et Agri food Canada a affiné ses prévisions : 34 Mt de blé seraient engrangées durant l’été dont 25,6 Mt de blé de printemps et 2,8 Mt de blé d’hiver (+ 65 % sur un an). Le pays pourrait alors exporter 19,3 Mt durant la prochaine campagne 2020-2021.
Mais les agriculteurs canadiens doivent s’attendre à une récolte d’orge inférieure de 7 % à celle de l’an passé (9,6 Mt contre 10,3 Mt). Pourtant, ils peineront à la valoriser à l’export en raison de la concurrence exacerbée qu’exerceront les productions mondiales de maïs et de blé sur les marchés des céréales fourragères. 2,8 Mt d’orge sont en jeu.
Par ailleurs, l’Ukraine serait en mesure d’exporter 5 Mt d’orges durant la campagne qui vient de débuter et l’Union européenne 5,6 Mt, dès que les moissons seront achevées.
Sans surprise, la Chine et l’Arabie saoudite seront leurs principaux pays clients. Ils importeront à eux deux 12 Mt d’orges, soit quasiment la moitié des quantités de la céréale exportées chaque année dans le monde. Mais cette année, le marché marocain représentera un débouché significatif et convoité car le royaume chérifien devra acheter 1, 2M t d’orge pour compenser sa petite récolte juste engrangée. L’an passé, il s’était contenté d’acheter 850 000 t de grains et en 2017-2018, 299 000 tonnes.
Mais la Chine, suivie par d’autres pays importateurs de céréales, pourrait imposer des normes sanitaires aux pays exportateurs sommés de vérifier que les grains embarqués sont indemnes de virus du Covid-19.
Des nouvelles de Russie et du Kazakhstan
Le dernier bulletin JRC MARS de la Commission européenne paru le 29 juin a fourni de nouvelles informations sur les conditions de cultures des céréales en Russie et au Kazakhstan. En Russie, des rendements de blé d’hiver, au-dessus de la moyenne des cinq dernières années, sont toujours d’actualité (l’USDA les estimait en juin dernier à 2,72 t/ha) mais les cultures d’orges déçoivent. Les conditions météorologiques au début du printemps (gel et déficit hydrique) auraient quelque peu altéré le potentiel de production des cultures. En juin dernier, l’USDA mentionnait des rendements moyens de 1,56 t/ha. Depuis, nous ne disposons pas de données actualisées.
Au Kazakhstan, des températures clémentes et des précipitations abondantes ont favorisé la levée et la croissance des céréales de printemps. Mais de fortes chaleurs survenues durant la période de floraison des blés d’hiver et de remplissage des grains affecteront les rendements. Tout porte à croire cependant, que le rendement moyen par hectare s’inscrira dans la moyenne des années précédentes. Le mois dernier, l’USDA l’estimait encore à 1,2 t/ha, en hausse de 20 % sur un an.
Dans le monde du négoce, la nouvelle campagne commencée n’offre aucun répit. Les commandes déjà passées portent sur la prochaine récolte.
L’Algérie est aux achats. Elle s’apprête à acheter du blé européen 218 dollars la tonne qu’elle se fera livrer en septembre prochain mais les volumes de grains négociés ne sont pas encore connus. La Jordanie s’apprête aussi à importer 60 000 t de blé de qualité hard et par la Corée du Sud de 60 000 t de blé fourrager mais les pays vendeurs ne sont pas encore identifiés. La Thaïlande convoiterait aussi 237kt de blé fourrager.
En France, les conditions de cultures demeurent inquiétantes. Selon Céré’Obs, 56%des surfaces de blé tendre sont jugées dans des conditions bonnes à très bonnes au 29 juin contre 75% l’an dernier à la même date.
Cependant, les conditions de culture du maïs restent favorables à 83 %, selon FranceAgriMer. La sole de maïs progresserait de 10,5 % par rapport à 2019 et de 12,1 % par rapport à la moyenne 2015-2019 pour atteindre 1,67 Mha. Les difficultés des céréales d’hiver et le recul du colza expliquent cette progression. Mais l’embellie n’est pas contagieuse. Dans l’Union européenne, 9 millions d’hectares seraient semés soit à peine plus que l’an passé (8,88 Mha selon l’USDA). 68 Mt pourraient ainsi être récoltées en Europe en tablant sur des rendements moyens de 7,6 tonnes par hectare.