C’est avec indignation et consternation que la FNSEA constate l’échec de la Commission Mixte Paritaire (CMP) chargée d’examiner le projet de loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole.
A la veille des difficiles négociations commerciales de l’automne, la manoeuvre politique l’a finalement emporté sur le réalisme d’un texte respectueux de l’esprit des Etats Généraux de l’Alimentation et du travail conjoint des parlementaires.
Où est passé le bon sens paysan ?
Sur la question centrale des indicateurs de coûts de production, rappelons qu’il s’agit juste de mettre à disposition des producteurs une référence neutre et indiscutable dans leurs relations commerciales avec l’aval de la filière. Sans ce garde-fou efficient, que peuvent peser les agriculteurs face à quatre centrales d’achat qui concentrent à elles seules 94% du marché alimentaire national ? Les députés de la majorité, membres de la CMP, ont délibérément ignoré cette réalité. Pire, c’est sur cette disposition qu’ils ont fait capoter la CMP, alors même qu’elle avait été votée conforme entre les deux Assemblées !
Les revenus ne se feront pas sans les prix !
Le bon sens ne l’a pas non plus emporté quand le rapporteur Moreau critique une soi-disant « vision passéiste » de l’agriculture française qui refuserait « sa transformation ».
Ces déclarations sont un affront à la profession agricole, qui depuis plus d’un an, s’est engagée, sans faillir, dans les Etats Généraux de l’Alimentation, qui a construit des propositions tournées vers l’avenir et qui, maintenant, attend des résultats.
Le passéisme n’est pas l’ADN du monde agricole, ni de la FNSEA. Pour preuve, la présentation, ce matin même, du contrat de solutions pour une trajectoire de progrès pour la protection des plantes. 36 propositions sont d’ores et déjà prêtes (et 300 en construction) pour assurer une transition pragmatique et gérable par les agriculteurs, conciliant la réponse aux attentes des marchés et des citoyens avec la nécessaire compétitivité des exploitations agricoles.
La « transformation » ne se fera pas contre les agriculteurs mais avec eux.
Points‐clés du conseil spécialisé
pour la filière « oléagineux, protéagineux, fourrages séchés et plantes textiles »
du 28 juin 2018
Le conseil spécialisé de FranceAgriMer pour les filières « oléagineux, protéagineux, fourrages séchés et plantes textiles » s’est réuni le 28 juin 2018 sous la présidence de Jacques Siret.
À l’ordre du jour, situation des marchés et focus sur les filières lin et chanvre qui ont présenté l’avancement de leurs plans de filières pour la période 2018‐2022.
Situation du marché des oléagineux et protéagineux
Monde : le complexe soja orienté à la baisse sur le marché à terme américain
L’ensemble du complexe soja (graines, huiles et tourteaux) est orienté à la baisse sur le marché à terme américain, en raison de conditions météorologiques favorables à la production mondiale. Cette tendance est renforcée par le conflit commercial entre les États Unis et la Chine.
En effet, suite à la mise en place par le gouvernement américain de taxes sur certains produits chinois importés, principalement l’acier et l’aluminium, la Chine a instauré des droits de douane supplémentaires pour des centaines de produits agricoles américains dont le soja. Parallèlement, elle a levé les droits à l’importation pour les autres origines de soja.
Or, le soja est le plus gros marché des États‐Unis à l’exportation vers la Chine (12 milliards de dollars en 2017). Mais quelles seront les alternatives d’approvisionnement de la Chine ? Pour mémoire, la Chine est le plus gros importateur de soja du monde, avec 101,5 millions de tonnes d’importations prévues en 2018/19. Elle s’approvisionne largement au Brésil puis aux États‐Unis. Les disponibilités du Brésil ne seront pas suffisantes pour suppléer les origines américaines. Ce pays subit en outre des troubles logistiques liés à la grève des camionneurs et à l’engorgement des ports, dans un contexte de forte hausse des taux de fret.
Union européenne : ralentissement prévisible de la trituration d’oléagineux suite à la baisse annoncée de la production en 2018/19
Selon les dernières prévisions Eurostat, la production européenne d’oléagineux en 2018 devrait fléchir à 34,3 Mt (‐ 2,2 Mt par rapport à l’an dernier), dont 21,7 Mt de colza (‐ 1 % par rapport à 2017), 9,7 Mt de tournesol (‐6 %) et 2,8 Mt de soja (+ 7 % en dépit de la baisse des surfaces). Dans ces conditions la trituration de graines oléagineuses devrait légèrement ralentir à 47,5 Mt en Europe après le pic atteint l’an dernier (48,3 Mt).
France : la France réduit sa dépendance en soja
Pour la campagne commerciale 2017/18, FranceAgriMer a revu ses prévisions de trituration de colza à 4,2 Mt, en recul de 225 000 tonnes par rapport à 2016/17. Les exportations françaises de colza sont estimées à près de 1,6 Mt, en hausse de 200 000 tonnes par rapport à la dernière campagne.
La trituration de tournesol devrait atteindre 1,3 Mt (+ 120 000 tonnes par rapport à 2016/17). Les exportations sont estimées à 400 000 tonnes, en hausse par rapport à la campagne précédente.
La trituration et les exportations de soja sont restées stables par rapport à 2016/17, avec un record de trituration depuis deux ans en raison de la progression de la production française, alors que, dans le même temps, les importations de soja ont diminué.
La bonne récolte de pois protéagineux en 2017 n’a pas permis de développer les débouchés sur le marché intérieur à destination des fabricants d’aliments du bétail. À l’exportation, la mise en place de droits à l’importation prohibitifs par l’Inde a bloqué les flux. La France a surtout développé ses ventes vers l’Union européenne. La féverole, moins compétitive que le pois en termes de prix, a trouvé moins de débouchés auprès des fabricants d’aliments du bétail que l’an dernier. La bruche a barré la route aux exportations vers l’Egypte mais la féverole française a trouvé preneur en Norvège pour l’aquaculture.
Focus sur le lin et le chanvre : des débouchés diversifiés, des atouts environnementaux
La filière du lin textile compte 5 400 producteurs sur 98 000 hectares, principalement répartis en Normandie et dans le Nord de la France, et dans une moindre mesure en Ile de France.
La France est le premier producteur mondial de lin. La production française, proche de 600 000 tonnes aujourd’hui, s’est redressée depuis 2012. La filière lin a exporté plus de 260 000 tonnes de lin en 2017, notamment vers la Chine.
Domestiqué il y a 10 000 ans, le chanvre constitue une très bonne tête d’assolement car il étouffe les adventices. Adapté à tous les types de sols, il résiste bien à la sécheresse et n’a pas besoin de produits phytopharmaceutiques. Ses fibres sont utilisées en papeterie ou pour les textiles, ses graines en
alimentation humaine et animale, ses bois en litière animale, paillage et écoconstructions.
Implantés sur 17 000 hectares, 1 400 producteurs français fournissent 6 chanvrières qui produisent 90 000 tonnes de paille défibrée et 17 000 tonnes de graines par an. La France est leader en Europe avec plus de la moitié des surfaces de chanvre.
Parmi les 600 produits dérivés du chanvre dans le monde, le béton de chanvre préfabriqué fait l’objet brevets français.
Pour en savoir plus, https://www.interchanvre.org
État d’avancement du plan de filière d’Interchanvre
Interchanvre, l’interprofession du chanvre, a présenté au conseil spécialisé, l’état d’avancement de son plan de filière décliné en 16 actions visant à :
-
- assurer un revenu intéressant aux producteurs
- mettre en place des critères de qualité
- garantir la quantité nécessaire aux marchés
- valoriser les qualités environnementales de la filière
- favoriser les matériaux biosourcés
- répondre aux attentes des consommateurs
La réalisation de certaines actions est bien avancée (défense des aides couplées, création de variétés spécifiques pour répondre à de nouveaux marchés, normalisation du label « chènevotte bâtiments », plan de communication). La consolidation du marché de l’automobile, de la construction et de l’alimentaire est à mi‐parcours.
Le plan de la filière lin : cap vers la qualité sur un marché mondialisé
Le plan de la filière lin, résolument européen, s’articule autour de cinq objectifs travaillés en ateliers :
- faire évoluer les pratiques culturales et la traçabilité du lin français en faisant adhérer les liniculteurs à la charte European Flax comme garantie d’origine et de qualité. L’objectif est de fournir une fibre de lin en quantité et en qualité, tout en répondant aux attentes sociétales, environnementales et sociales.
- améliorer les pratiques de teillage : automatisation, traçabilité des lots de paille, valorisation des coproduits, renforcement de l’attractivité du métier…
- qualifier les matières, sur la base d’un référentiel professionnel commun permettant de décrire chaque lot en fonction de plusieurs critères (longueur, couleur, finesse, degré de propreté).
L’objectif est d’améliorer la qualité des produits pour mieux répondre aux attentes des clients et des nouveaux marchés.
- garantir l’approvisionnement de la filière, via la contractualisation et l’adhésion à la charte European Flax, la numérisation des données et un observatoire de veille.
- renforcer le suivi des marchés et la prospective à plus long terme.
- renforcer la promotion pour développer les débouchés.
Pour en savoir plus sur le conseil spécialisé du 28 juin 2018 : http://www.franceagrimer.fr/filieregrandes‐
cultures/Oleoproteagineux