
Marché des céréales
Une campagne de commercialisation
sans pitié pour les céréaliers français
L’Union européenne ne profite pas du dynamisme des échanges commerciaux de céréales dans le monde. En France, 2,2 Mds d’€ de blé en moins seront vendues par rapport à 2019-2020. Dans les fermes, la majorité des agriculteurs n’a pas les moyens de financer l’implantation des céréales d’hiver faute de trésorerie.
Le cours de la tonne de maïs reste supérieur à 160 € sur le marché de Bordeaux depuis le 20 août dernier. Il s’établit le 11 septembre à 165 € après avoir oscillé autour de 163 € - 164 € tandis que l’euro vaut toujours 1,18 dollar.
Dans l’attente du nouveau rapport de l’USDA, qui dressera un panorama actualisé de la production de maïs dans le monde, les opérateurs ne sont pas restés indifférents aux dernières nouvelles parvenues ces derniers jours.
Dans l’hémisphère nord, la récolte a commencé. Les Etats-Unis resteraient les moteurs de la campagne au niveau mondial (384 à 388 Mt, + 39 Mt sur un an) mais un ajustement de leur production n’est pas exclu compte tenu de la détérioration des conditions de culture soulignées par le Conseil international des céréales (CIC) dans son rapport paru le 28 août. L’USDA nous donnera plus de précisions dans les prochains jours. Nous en serons aussi plus sur les pertes générées par la violente tempête survenue en Iowa et qui avait affecté quelque 3,3 millions d’hectares, soit 60 % du total des superficies de l’état américain.
En Europe, les conditions de culture du maïs se détériorent irréversiblement. En France, elles sont bonnes à très bonnes à hauteur de 61% comme l’an passé à la même époque. En Ukraine, 33 Mt et 35 Mt de grains seraient récoltées alors que l’USDA tablait le mois passé sur 39 Mt et le CIC, sur 37 Mt. En cause, là encore, la sécheresse qui retarde déjà les emblavements des cultures d’hiver.
En Chine, 261 Mt de maïs seraient produites comme l’an passé. Aussi, l’ex-empire du milieu puiserait dans ses stocks et importerait 7 Mt au cours des prochains mois pour approvisionner son marché intérieur (293 Mt), selon « La lettre de Chine » publiée courant août par France Export céréales.
Toujours en Chine, la fabrication d’aliments (213 Mt en 2020-2021) progresserait de 8 Mt car les élevages porcins se reconstituent. Mais leurs formulations comporteraient davantage de blé et de sorgho. Enfin, la production de bio-éthanol poursuit son ascension : 84 Mt seraient transformées, soit 2,5 Mt de plus que durant la précédente campagne.
En France, l’Association générale des producteurs de maïs (AGPM- France) rapporte que la campagne d’exportations a très bien commencé au Brésil (4 Mt vendues en juillet). Mais les premiers semis de la Safrina, qui se déroulent notamment après les récoltes de soja et de coton, prennent du retard. La Niňa sévit, les sols sont secs.
Quant au blé, on ne compte plus les plèbes qui s’abattent sur la filière céréalière française et sur ses producteurs : prix de vente, rendement, sécheresse, parité euro-dollar, coûts de production excessifs et revenu en chute libre.
Ne disposant que de 12 à 13 Mt de blé exportables, la France n’est plus que le 6ème pays exportateur dans le monde.
Pourtant elle peine à vendre son blé hors de l’Union. En semaine 10, seules 2,4 kt ont été expédiées selon FranceAgriMer contre 98,7 kt la campagne passée. Pour l’orge, les ventes sont insignifiantes (52 t). Depuis le 1er juillet dernier, 709 kt de blé (1,32 Mt un an plus tôt) et 682 kt d’orges ont été expédiées vers des pays tiers.
Pourtant le blé produit est de bonne qualité selon FranceAgriMer : 42 % du blé est « prémium » (taux de protéines supérieur à 11,5 %, force boulangère supérieure à 170; poids spécifique supérieur à 77 gr et indice de chute Hagberg supérieur à 240. Et 35 % du blé collecté est « supérieur ».
D’ici la fin de la campagne, 2,2 Mds d’€ en moins de céréales seront vendues par rapport à 2019-2020, selon l’Association des producteurs de blé (AGPB).
Toujours selon l’AGPB, 15 % des céréaliers pourraient cesser leur activité faute de revenu et surtout de trésorerie pour financer les mises en culture des céréales d’hiver.
La faiblesse des rendements renchérit mécaniquement les coûts de production de chaque tonne de céréales récoltée. Leur culture n’est pas rentable.
La mauvaise répartition des aides directes entre les filières de production rend aussi les céréaliers français moins résilients et par conséquent moins compétitifs que leurs collègues allemands, selon l’AGPB. Ils percevraient 100 € d’aides directes par hectare en moins, soit 10 000 € en moins pour 100 hectares.
Dans l’Union européenne, la situation n’est guère meilleure : 2,9 Mt de blé (5,2 Mt l’année passée) et 1,44 Mt d’orges (1,7 Mt l’année passée) ont été expédiées depuis le début du mois de juillet. L’Arabie Saoudite a lancé un appel d’offre de 750 000 tonnes mais avec un euro à 1,18 dollar, les pays européens ne sont probablement pas les mieux placés pour l’emporter.
Les producteurs français de blé dur font aussi grise mine. Le cours de la tonne a baissé de 40 € en deux mois sur le marché de La Palice. La production mondiale est déficitaire d’un million de tonne mais le Canada a engrangé 6,9 Mt de grains, soit 1,9 Mt de plus que l’an passé, selon StatCan, l’institut canadien de statistiques. Le pays est en mesure d’exporter jusqu’à 5,9 Mt de grains, soit les deux tiers des quantités exportables dans le monde, en imposant ses prix de vente. L’Union européenne, loin derrière avec 1,1 Mt, ne fait pas le poids. En euros, la céréale est chère alors que son prix ne couvre pas là encore les coûts de production. En France, la récolte est mauvaise (1,3 Mt selon le CIC). Le rendement moyen (51,6 q/ha) régresserait de 19 % par rapport à 2019. Il serait inférieur de 5 % à celui de la moyenne quinquennale 2015-2019.




