Marché des céréales
Réorientation des flux sur le marché mondial
Blé
La volatilité sur les marchés est extrêmement importante, rendant l’activité des opérateurs sur les marchés compliquée. Vendredi dernier, l’échéance mai sur Euronext pour le blé tendre a perdu plus de 25€/t, pour reprendre 50€/t sur lundi et mardi. Et ce, sans compter la variations intrajournalières. A Chicago, hier, les contrats de mai, juillet et septembre ont atteint leur limite haussière maximale de 0,75 $/bu.
Ce jeudi, le blé sur le marché à terme de Chicago valait plus de 1200 cts/bu et sur Euronext l’échéance mai valait 366,25€/t. La hausse des cours ne semble pas s’arrêter les marchés et on s’approche des 400€/t.
En effet, les flux du commerce mondial sont réorientés face aux défauts de livraisons pour les origines de la mer Noire. L'Algérie aurait déclaré qu'elle accepterait du blé français lors du prochain appel d'offre, tandis que des rapports indiquent que les privés égyptiens recherchent désespérément des offres à des prix "raisonnables", mais n'en trouvent aucune. Et du côté des achats publics, le GASC a annulé les derniers appels d’offres mais disposeraient de réserves.
L'impact sur les pays importateurs commence à se faire sentir et le printemps arabe est encore frais dans de nombreuses mémoires. La Tunisie, fortement dépendante des grains origine mer Noire, sera beaucoup impactée par le conflit russo-ukrainien dans les mois à venir selon Intercéréales. En effet, bien avant les évènements de la semaine dernière, la Tunisie faisait déjà face à un épuisement accru des stocks de produits de première nécessité, tels que la farine, le sucre, la semoule ou encore l’huile.
Et ces derniers temps, le pays a de plus en plus de mal à s’approvisionner, notamment en blé tendre et en blé dur (pour la fabrication de farine et de semoule) compte tenue de la situation budgétaire de l’Etat, particulièrement tendue et des difficultés de l’Office National des Céréales à payer ses fournisseurs avant livraison. L’approvisionnement en blé est impacté, en plus des cours mondiaux du marché, par la hausse des prix du transport qui renchérit davantage le coût des importations pour le pays.
Pour la récolte 2022, en France, les cultures se portent bien. Selon Céré’Obs, au 28 février, 93% des surfaces se trouvent dans un état bon à très bon, contre 88% l’an dernier à la même date. L’inquiétude est à voir là aussi du côté de l’Ukraine, les agriculteurs ukrainiens seront-ils en mesure d’implanter leurs cultures de printemps ? Cela impacterait les équilibres mondiaux en céréales, y compris sur l’ensemble de la campagne prochaine.
Maïs
Bien que les cours aient progressé de façon plus mesurée que le blé à Chicago, le maïs sur Euronext a gagné 50€ par rapport à la semaine dernière et les conséquences du conflit sur le marché sont toutes aussi inquiétantes.
Aux Etats-Unis, l’USDA a rapporté une vente de 337 kt de maïs pour l'année en cours pour une destination inconnue. A priori, les chinois, qui ont acheté du maïs ukrainien, doivent désormais se rabattre sur le maïs américain.
Plus proche de nous, l’absence de l’Ukraine pour les importations de maïs risquent d’être importantes. Jusqu’à ce jour, selon les statistiques de la Commission européenne, l’Ukraine est la 1ère origine importée en Europe (5,9Mt depuis le début de la campagne, en date du 28 février). Le Brésil est la 2ème origine avec 3,3Mt. L’Espagne est en tête des importateurs de maïs (4,6Mt depuis le début de la campagne) suivi des Pays Bas (2Mt) et du Portugal (1,1Mt). L’Espagne et le Portugal disposent de réserves, mais pour quelques semaines. Il faudra alors se rabattre sur le maïs d’origine sud-américaine. Au Brésil, les semis de maïs safrinha sont terminés à 64 % dans le centre-sud, par rapport à 39 % l’année dernière. La production est attendue à 111,5 Mt selon le CIC. Les estimations de production ont été revues à la baisse ces dernières semaines, les cultures ayant été détériorées en raison du temps chaud et sec dans le sud du Brésil, impactant les rendements.
En France également, même si les fabricants d’aliments privilégient le maïs français, l’impact de la hausse des cours aura des répercussions importantes pour les élevages, déjà dans une situation difficile bien avant le conflit.
Au-delà du maïs, les fabricants d’aliments sont également utilisateurs de tourteaux de tournesol. L’Ukraine représente 50 % des exportations mondiales d’huile de tournesol, dont les tourteaux sont des coproduits pour l’alimentation notamment des porcs et des volailles. Les élevages sont en risque.