Marché des céréales
Récolte 2022 : tout se joue dans les prochains jours
Le déficit de précipitations compromet la récolte de céréales françaises. Or les pays importateurs comptent sur notre pays pour approvisionner les marchés des grains. Pour 2022-2023, l’USDA annonce une production mondiale de blé (774 Mt) déficitaire de 13 Mt.
Après plusieurs jours d’accalmie, le cours de la tonne de blé a de nouveau franchi le seuil de 400 € sur le marché de Rouen. Ce vendredi 13 mai, la tonne de la céréale valait 406 €.
A son niveau actuel, la quasi parité de l’euro avec le dollar (1 $=1,06 €, - 5 % sur un mois ; -12 % sur un an) n’atténue plus la volatilité des prix sur le marché mondial. La moindre variation des cours mondiaux en dollars des grains se répercute dans les mêmes proportions sur les places de marché européennes.
Celles n’ont pas manqué de réagir dès que les opérateurs ont pris connaissance du dernier rapport de l’USDA, l’organisme de statistique américain, paru le 12 mai dernier. Pour le blé, il annonce une production mondiale (775 Mt) déficitaire de 13 Mt.
« Les conditions de cultures aux Etats-Unis et en Europe sont partagées, soulignait la veille FranceAgriMer. Par ailleurs, le conflit en Ukraine crée de nombreuses incertitudes ».
Le 11 mai dernier, une partie du conseil spécialisé « grandes cultures » de FranceAgriMer était justement dédié à la détérioration des conditions climatiques et à ses conséquences, aux Etats-Unis mais pas seulement.
En France, sans précipitations, une accélération de la fin du cycle végétatif des céréales compromettrait les rendements à venir. Or les potentiels de rendement étaient, jusqu’à récemment, très prometteurs. Selon Céréob’s, l’outil de FranceAgriMer qui note les conditions de croissance des céréales, ces dernières étaient encore le 2 mai dernier pour le blé, bonnes ou très bonnes à 89 %.
Mais avec un déficit pluviométrique qui atteint parfois 40 % dans certaines petites régions, les conditions de cultures pourraient très vite se détériorer et les dégâts occasionnés être irréversibles.
Les derniers arbitrages opérés par les agriculteurs sur leurs cultures de printemps témoignent leurs craintes. Leurs prises de risques sont limitées. Une partie des céréaliers a décidé de semer moins de maïs grains (1,5 Mha ; -6 % sur un an) et plus de tournesol (758 000 ha de tournesol ; + 17 % par rapport à la moyenne quinquennale 2027-2021), là où la culture est possible. Par ailleurs, la plante est moins gourmande en azote et donc moins onéreuse à produire.
En 2022-2023, la production mondiale de blé serait non seulement déficitaire en blé mais aussi mal répartie. Selon l’USDA, l’Ukraine ne produirait que 21,5 Mt l’été prochain, soit 11,5 Mt de moins qu’en 2021. Et le pays exporterait moitié moins de grains que les années passées (10 Mt). Or dans le même temps, la Russie s’apprêterait à produire 80 Mt blé si aucun accident climatique ne survenait d’ici la récolte. Et son disponible exportable serait alors de 39 Mt.
Les sanctions internationales prises à l’égard du pays ne portent pas sur ses ventes de céréales mais Moscou pourrait brandir l’arme alimentaire et choisir ses partenaires commerciaux.
Or la demande mondiale de blé croîtra. Les échanges mondiaux progresseraient de 4 Mt au cours de la prochaine campagne et atteindraient 205 Mt, selon l’USDA.
Le retour du Canada sur les marchés des céréales l’été prochain est attendu avec impatience (24 Mt à l’export). Mais le pays ne peut pas seul combler le déficit mondial de blé tendre annoncé par l’USDA.